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Moments de lucidité, de violence, d’obscénité

Je suis confrontée à un problème douloureux: mon père a 83 ans, atteint, semble t’il de démence vasculaire, avec des moments de lucidité, des moments de violence et des moments d’obscénité. Je vis à 800 km mais vais le voir chaque mois pendant quelques jours. mais comment dialoguer avec lui? ses plaisanteries obscènes me choquent. Il vit seul et a fait le vide autour de lui, y compris avec la personne qui l’aidait (harcèlement, intolérance, attouchements) comment lui parler, que faire pour le mettre à l’abri, tout en protégeant les autres merci beaucoup de votre aide.

Lydia répond:

Oui, ce que vous décrivez est bien douloureux: perdre son père, ou en tout cas celui qu’on connaissait, est chose très pénible. De plus vous décrivez des débordements verbaux, des obscénités, attouchements… Il faut comprendre une chose: avec une telle affection mentale arrive un relâchement du contrôle social, donc ce qui a été caché devient apparent. Je pourrais aussi dire que l’ombre (d’après Jung) de la personne devient visible. Ce que l’on a réprimé toute sa vie pour des raisons sociales, de bienséance, de honte, fait surface et surprend évidemment car jamais cette personne n’aurait laissé entendre quoi que ce soit, tout au contraire : cela devait être tabou, interdit, bloqué, impensable. Ma mère aussi était atteinte de la même démence, et elle a commencé à me parler sexe alors que c’était un mot imprononçable et honteux avant. Il semble que votre papa n’a pas résolu quelque chose avec le domaine sexuel. Il a probablement des blessures cachées qui y sont liées.

Si on comprend que la personne âgée doit venir à bout avec des aspects non résolues de sa vie, même si cela se passe de façon socialement inacceptable, vous allez changer d’attitude et voir plutôt un être souffrant que pervers. Si vous pouviez faire appelle dans votre région à une personne qui connaît la validation, ce serait très utile. La validation est une certaine façon de communiquer avec ce type de malade du grand âge. Vous pouvez aussi vous procurer le livre de Naomi Feil « La validation, mode d’emploi » Ed. Pradel et de Vicki de Klerck « La méthode de Naomi Feil à l’usage des familles » Ed. Lamarre

Suite de la question :

Bonjour et merci infiniment de votre réponse En allant sur votre site (découvert par hasard, un bon hasard!) je me suis un peu raisonnée par rapport à mes premières réactions, et votre mail me pousse à faire la même chose : voir la maladie de mon père et sa souffrance comme quelque chose qui ne sera plus vraiment lui. Entendre que c’est mon père souffrant et malade qui parle et agit, pas celui que je connaissais et aimait. J’essaie de le faire, c’est douloureux puisque le dialogue « vrai » n’apparaît plus guère, un vrai deuil, difficile puisque la personne est encore devant vos yeux (ou au bout du fil) Je vais essayer de me procurer ces livres pour mieux comprendre et ne pas trop en souffrir ni le faire souffrir. Mais l’urgence conduit à une solution qui va le choquer (hospitalisation ou internement….) qui nous choqueront tous les deux, cependant je me dis que mon père est trop un danger pour lui et pour les autres pour que cela ne conduise pas justement à ce type de solution. Je vais le voir cette fin de semaine et réagirai en conséquence, mais vraiment un très grand merci de m’avoir répondu, un grand merci aussi pour l’humanité de cette réponse je vous souhaite une belle journée