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Je ressens de l’injustice car mon père a tant envie de vivre

En octobre passé, peu avant de fêter ses soixante ans, mon père a appris qu’il était atteint d’un cancer incurable de la vésicule biliaire à évolution très rapide. Il avait bénéficié d’une excellente santé jusqu’ici. Un petit mois auparavant, j’avais accouché de mon premier enfant, son premier petit-enfant. Vivre ces deux moments de vie en parallèle a été extrêmement difficile pour moi, tout en étant une chance, d’une certaine façon. Alors que j’étais très triste fin décembre et qu’il tentait quand même un traitement chimio afin de retarder un peu l’évolution de la maladie, j’ai entendu l’une de vos émissions radio et ai acheté votre livre. Le parallèle entre mourance et naissance m’a énormément parlé, alors même que je venais de vivre mon accouchement, et les étapes que vous décrivez m’ont énormément aidé à surmonter des moments émotionnellement très pénibles. Aujourd’hui, il attend les résultats d’un scanner suite à un nouveau cycle de chimio (la dernière n’a pas fait effet) et nous, ses proches, nous sentons comme suspendus. J’ai beau savoir et accepter, remettre l’issue en d’autres mains que les miennes, je ne peux m’empêcher d’être tourmentée, inquiète. Je crains d’être à nouveau mise à genoux par la douleur, comme cela a été le cas lors de l’annonce de son cancer. Je crains que ceci me rende moins disponible pour mon petit garçon. Je crains qu’il n’aie aucun souvenir de son grand-père qui l’aime tant lorsqu’il aura grandi. Plus que tout, je ne peux m’empêcher de ressentir de l’injustice car mon père a tant envie de vivre, et est, envers et contre tout, si vivant.

Réponse de Lydia :

Je vous remercie pour votre message qui exprime toute votre douleur. En effet, vu le diagnostic assez sombre et les traitements ne semblant pas bien efficaces, vous devrez probablement vous préparer à l’accompagner sur sa dernière trajectoire, ce qui sera important pour lui comme pour vous. En ce qui concerne votre bébé: Ne vous faites pas trop de souci pour lui. Dites-lui sincèrement ce que vous ressentez en lui précisant qu’il n’y est pour rien. Ne vous cachez pas pour pleurer non plus, restez en lien! De toute façon, il sent tout, donc autant lui expliquer avec des mots simples. Nous avons pas idée combien les bébés sentent et comprennent! Cet enfant vous aidera d’ailleurs à rester connectée avec la vie. Et si cela devait devenir trop difficile, demandez à votre mari ou un proche de prendre le relais auprès du bébé pour un petit moment en lui expliquant. Pour le moment faites que votre papa et votre fils se voient le plus possible (si votre père le supporte). Les bébés ont une force de vie incroyable. Plus tard, vous lui parlerez de votre papa. Vous lui raconterez des histoires de et avec lui, histoires qui parlent de l’amour que vous aviez l’un pour l’autre. A votre père vous pourrez suggérer un jour – tant qu’il aura des forces – d’écrire une lettre à son petit-fils avec tout ce qu’il voudrait lui dire, lettre que celui-ci lira un jour, comme un héritage spirituel faisant le pont à travers le temps. Je vous souhaite beaucoup de forces et malgré tout confiance en la vie.