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Bénévole atteint de la sclérose en plaques

Accepter c’est…

koppTémoignage d’un bénévole atteint lui-même d’une maladie évolutive et formé pour accompagner des malades de la Sclérose en Plaques.

Voilà déjà plusieurs années, que je me sens prêt pour m’investir dans l’accompagnement des personnes en fin de vie. Le temps est venu pour moi que cet engagement se réalise enfin pour me mettre au service de l’Autre.

Atteint d’une sclérose en plaques évolutive et étant en invalidité 2ème catégorie, je ne travaille plus. Il m’a fallu attendre d’être en paix avec cette maladie pour comprendre ce que voulait dire le mot « accepter ». Certains appellent « habitude » notre acceptation, et pour eux, accepter, c’est renoncer à la lutte, c’est ne plus désirer guérir, c’est peut-être même trouver quelque agrément à la situation de malade, c’est en tout cas tomber dans la passivité.

Ils ne se doutent même pas qu’« accepter » notre maladie, c’est au contraire avoir pris l’énergique résolution de ne pas laisser, à cause d’elle, notre vie sombrer dans la stérilité. C’est avoir compris l’inanité de la révolte et des plaintes, et que, lutter contre le mal, ce n’est pas s’obstiner à frapper à coups redoublés sur des barreaux rigides qui ne céderont pas. Accepter, ce n’est pas détourner lâchement les yeux de notre état, c’est au contraire n’en plus rien vouloir ignorer, afin de tenter de réunir tout ce qui peut lui être opposé. C’est acquérir l’intelligente connaissance de nos possibilités, afin d’en tirer le plus hautement utile pour ceux qui nous approchent et pour nous-mêmes; c’est tenter de nous faire aussi peu pesants qu’il est possible sur les bras qui nous soutiennent. Accepter, c’est avoir appris à souffrir silencieusement… et seul s’il le faut ; s’est s’interdire de souligner le prix de son sacrifice, mais consentir à en donner généreusement le fruit. C’est maintenir, au dessus de tous les orages et de toutes les ruines, son cœur brûlant d’amour. Accepter, ce n’est en rien cesser de poursuivre sa guérison, mais c’est avoir découvert à côté de ce but terrestre, un but plus élevé; c’est tenir notre courage prêt à s’accroître en proportion des exigences de Dieu à notre égard.

Le monceau d’efforts, de souffrances, de volonté, de patience, qui se dépense au cours d’une seule journée de malade, la somme de discipline de soi-même, de sacrifice et d’amour qu’exige une maladie longue que l’on veut souffrir sans trop d’égoïsme, échappent complètement à la majorité des bien-portants. En effet, la majorité des bienportants s’imaginent qu’une fois les premières révoltes étouffées, le malade arrive à une sorte de plate forme sans aspérités, à un état définitif d’apaisement tranquille!… Ils croient qu’une fois pour toutes, on renonce à tout.  

Heureusement, pour comprendre et excuser l’incompréhension qui nous est si souvent douloureuse, dont les bien-portants font preuve à l’égard de nos vies de malades, nous avons, nous, la double expérience du bien-portant que nous fûmes, et du malade que nous sommes. Nous n’avons qu’à regarder en nous-mêmes et à nous rappeler. Voilà déjà un certain temps que je gardais ces réflexions enfouies au fond de mon cœur, les partager avec vous aujourd’hui, me permet de me présenter à vous le cœur plein d’enthousiasme et de disponibilité. Je sens croître en moi l’impossibilité de l’indifférence pour autrui; et en acceptant cette souffrance implacable, impitoyable, que je veux croire, en partie du moins, imméritée, j’ai l’impression d’insérer ma vie dans la vie universelle, et de découvrir les liens qui relient nos âmes à un principe transcendant.

Marc Kopp

Suite à ce témoignage, Lydia Müller a posé une question à Marc : « Crois-tu en une guérison? »

Marc répond par mail : « J’ai découvert combien il est extraordinaire de convenir à quel point notre vie, quelles qu’en soient la forme et les mutilations, devient riche, variée, subtile, attachante dès qu’on a compris la valeur souveraine des choses de l’âme. Ce qu’il y a de plus réel pour moi, c’est ma vie intérieure. Elle est en moi tout à la fois comme un foyer qui doit être alimenté sans cesse et comme un puissant moteur qui imprime le mouvement à tout mon être. Je crois que l’exercice spirituel intensifie l’âme comme l’exercice physique fortifie la musculature et la rend plus apte à l’effort. En ce sens le miracle a lieu, et avec lui une forme de guérison…

Comme le dit souvent mon Maître Spirituel, « tu es protégé, ne t’en fais pas ». Plus j’avance et plus je prends conscience de la grâce qui m’est accordée de pouvoir encore faire des choses que ma maladie chronique évolutive m’interdirait en principe de faire. Suis-je arrivé à cette joie dans la douleur dont parlent certains ? Non. Peut-être est-ce trop grand pour moi. Je ne suis arrivé qu’à la volonté, tout à la fois humble et ardente, de ne pas faillir à ma destinée, de ne pas laisser perdre cette « utilité de la souffrance » que Dieu m’a révélée. »