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Elle a toujours adoré les fleurs et elle est partie dans un parfum de roses

dorisJ’ai rencontré Doris il y a 20 ans alors que je commençais mon activité de secrétaire comptable au sein de l’Association Genevoise des Malentendants. Elle était un membre actif, souriant et plein de vie. Néanmoins, elle souffrait d’isolement car elle vivait seule et n’avait pas du tout de famille.

Doris avait une passion, un amour débordant pour les fleurs. Son balcon ressemblait à une prairie au printemps, à un arc-en-ciel en été et aux couleurs d’une forêt en automne.  Elle était coquette et très élégante comme une fleur.

Il y a deux ans, suite à un AVC, Doris ne put retourner à son domicile et résidait dans un EMS genevois. Le 5 juillet 2016, elle fêtait ses 90 ans et le 31 août, en début d’après midi, l’infirmière de l’EMS m’informait que Doris était en train de s’éteindre doucement. Par amitié, je me suis rendue à son chevet. Je venais tout juste de finir ma formation d’accompagnatrice en fin de vie.

Sa chambre était sombre et elle était allongée dans son lit, son visage était très joli, mais sa respiration était difficile et j’entendais son râle.

Assise à côté d’elle, je lui ai dit « Bonjour Doris » et je me suis présentée afin qu’elle soit rassurée. Avec beaucoup de délicatesse, j’ai juste posé ma main sur la sienne, puis j’ai respiré tranquillement afin de ne faire qu’une avec elle, comme je l’avais appris durant la formation. Je lui ai parlé doucement pour lui dire que j’étais à ses côtés et qu’elle n’était pas seule. Puis, j’ai ressenti le besoin de prier pour nous, à voix haute. Je pense qu’elle m’entendait car, au fur et à mesure, sa respiration se faisait moins bruyante. Je lui ai alors parlé du temps où elle venait à l’AGM, de tous les moments de partages et d’amitié.

Je lui ai murmuré la mélodie d’une chanson « Le pouvoir des fleurs » de Laurent Voulzy. Sa respiration se calmait de plus en plus. C’est alors, que j’ai passé mon autre main jusqu’à son épaule et je me suis avancée pour lui dire : « Doris, si vous voyez la lumière, n’ayez pas peur car derrière il y a une prairie avec toute sorte de fleurs, des coquelicots, les pâquerettes, des roses, des tulipes. A ce moment là, elle a fait une première et longue apnée. J’ai pris sa main dans la mienne et j’ai senti les frissons parcourir mon corps. Alors je lui ai dit : « Doris, je sais que vous êtes en train de sentir les roses » car à ce moment précis, il s’est dégagé une odeur de roses et j’ai accueilli son dernier souffle. Je suis restée près d’elle encore quelques minutes afin de me recueillir, mais j’avais le cœur en joie d’être présente, de l’avoir accompagné dans ce passage et vers son ultime voyage avec amour et tendresse.

Que l’âme de Doris repose en paix parmi les fleurs. Elle s’est entourée toute sa vie de roses et elle a fini par avoir le parfum.

Paqui